Communiqué de presse

Crise du secteur agricole : contribution belge pour le prochain Conseil des Ministres européens de l’Agriculture

Les éleveurs européens, en particulier dans les secteurs laitier et porcin, font face depuis plusieurs mois à une situation économique et humaine difficilement tenable. Le recul du niveau des prix, amplifié par la fermeture du marché russe qui est un acteur importateur majeur de produits agricoles européens, rendent impossible la juste rémunération de leur travail et leur capacité à rembourser les investissements auxquels ils ont consentis pour adapter leur outil de travail aux défis nouveaux. Mêmes les fermes les plus performantes et d’avenir travaillent à perte et sont directement menacées. Par ailleurs sur ces 15 dernières années, le nombre d’exploitations belges a déjà diminué de plus de 40 %.

 

Les analyses convergent sur le déséquilibre entre offre et demande, déséquilibre qui rend nécessaire un signal clair de l’Union européenne et en plus, nécessite l’adoption de mesures structurelles spécifiques en premier lieu pour le secteur du lait que pour le secteur du porc tout en gardant une attention particulière pour les autres secteurs pour lesquels certaines des mesures proposées pourraient s’appliquer.

 

La Belgique tient à rappeler qu’au plan général le secteur agricole n’est pas responsable de la crise.  Il revient donc au budget européen de dégager les moyens supplémentaires permettant la mise en œuvre des mesures de crise.

 

De nombreux Etats membres, à l’issue du Conseil du 15 février dernier, ont reconnu l’urgence de la situation.

 

Propositions belges

 

Renforcement des organisations de producteurs et de la place des producteurs dans la chaîne alimentaire

 

De manière transversale, les organisations de producteurs peuvent jouer un rôle important dans la gestion de crise. Si elles mettent en œuvre des mesures de gestion de crise, les organisations de producteurs devront être financées par des moyens européens. Par extension, les organisations de producteurs dans les secteurs animaux devraient également recevoir des moyens pour établir des programmes opérationnels visant le renforcement de la position du producteur et pour viser un meilleur équilibre entre offre et demande. 

 

En plus, cela peut être complété par une réduction temporaire, volontaire et compensée de l’offre au niveau Européen au sein des organisations de producteurs.

 

Mesures à court terme

La Belgique plaide pour des mesures financées par des moyens européens. Les pistes suivantes pourraient être appliquées au niveau des Etats membres ou Régions :

 

-      Des mesures pour alléger les charges fixes des producteurs :

 

1.      encouragement aux éleveurs laitiers et de porcs à limiter partiellement le renouvellement de leur troupeau afin d’alléger les coûts fixes de l’exploitation ;

2.      soutien aux herbages en encourageant les éleveurs laitiers à augmenter la part du fourrage grossier dans l’alimentation du bétail, renforçant ainsi l’autonomie fourragère des exploitations. Cette mesure permettrait en outre de renforcer le lien entre la production et le sol et de valoriser la production à partir de l’herbe ;

3.      renforcement de la solidarité en faveur des jeunes agriculteurs via la possibilité d’instaurer dans l’enveloppe des aides directes de nouveaux mécanismes de soutien en faveur des jeunes producteurs de lait ou de porcs ;

4.      mesures de facilitation en matière de crédits. L’obligation d’honorer les engagements bancaires liés aux investissements condamnent les éleveurs à produire à n’importe quelles conditions. Un assouplissement des échéances de crédit permettrait à l’éleveur d’adapter sa production pour limiter ses pertes ;

5.      mesures complémentaires en faveur de l’investissement et de l’innovation dans divers secteurs.

 

-      Des mesures pour encourager la consommation :

 

1.      campagne de promotion des produits européens à l’échelle de l’UE pour renforcer l’information des citoyens sur la qualité des produits européens et leur origine ;

2.      extension et un renforcement des outils disponibles de distributions gratuites au niveau des banques alimentaires et organisations caritatives.

 

Mesures à moyen et long terme

 

La Belgique souligne que les mesures suivantes devraient être mises en œuvre :

 

1.      Amélioration du monitoring des marchés par le renforcement de la proactivité et de l’efficacité de l’observatoire européen des prix :

a.      élargissement aux secteurs du porc et de la viande bovine (niveaux de production et d’abattage, les niveaux d’inséminations, les stocks, bilan production,…)

b.      Extension de son activité aux coûts de production et aux marges de rentabilité

c.       mise en œuvre des mécanismes d’alerte précoce et de prévention des crises doivent être déterminés en vue de responsabiliser les opérateurs.

 

Ce Monitoring devrait tenir compte des particularités par Etat membre ou zone géographique.

2.      Mise en œuvre de mécanismes de répartition plus équitable de la valeur ajoutée au sein de la chaîne ;

  1. Accélération des travaux de la Task Force « marchés agricoles » et du Forum à haut niveau sur le fonctionnement de la chaîne alimentaire ;
  2. Examen par la Commission européenne d’un outil de stabilisation des revenus.
  3. Renforcement du travail portant sur nos exportations – Levée des barrières sanitaires :

 

a.      Accélérer le dialogue avec la Russie pour lever les restrictions sanitaires dues à la peste porcine africaine

 

b.      Ouverture de nouveaux marchés / soutien aux exportations

Les contacts économiques sont importants mais ne peuvent être réalisés sans un accord sur les barrières non-tarifaires, principalement concernant les questions sanitaires et phytosanitaires (SPS).

 

La Belgique souhaite une approche intégrée des discussions SPS dans chaque discussion externe. Une telle coordination avec la DG Santé et la DG Trade conduira finalement à des arguments plus forts et constitue un levier pour l'ouverture de nouveaux marchés. Dans ce cadre, il est important de rechercher un système réalisable et efficient afin de déboucher sur un accord politique et technique très rapidement dans l'exportation concrète.

 

La Belgique est convaincue qu’il faut accélérer les processus de négociations en cours en vue d’obtenir des résultats concrets.

 

Finalement, il est nécessaire de mettre en œuvre des systèmes d’assurances pour l’exportation de produits agricoles et alimentaires, à l’instar des pratiques dans d’autres secteurs actifs sur les marchés d’exportation.

 

Négociations commerciales internationales

 

Les agriculteurs européens ne peuvent être préjudiciés par les projets d’accords commerciaux internationaux, dont le TTIP. L’agriculture ne peut pas être la variable d’ajustement à tout accord négocié entre la Commission Européenne et des pays tiers.

 

La Belgique rappelle sa demande de réalisation d’études d’impact sur l’agriculture qu’auraient de tels projets d’accords, de même qu’une étude d’impact cumulative des accords récemment conclus ou en cours de négociation.

 

Mesures fiscales et sociales nationales

 

La Belgique demande que la Commission laisse la possibilité aux Etats membres d’utiliser des instruments fiscaux ou liés à des cotisations nationales obligatoires en vue d’alléger les trésoreries des agriculteurs et donc de soutenir leur secteur agricole. Il ne s’agit pas ici de donner des moyens en numéraire, mais bien de tenter de diminuer certaines charges pesant sur les secteurs agricoles en difficulté.